LACONGOLAISE 242

Un  voyage dans le Congo profond

MURIELLE MABOUMBA: « EN 6ᵉ, J’AI PRIS GOÛT À LA PEINTURE, J’AI DÉCIDÉ DE L’EXERCER PLUS TARD ».

MURIELLE MABOUMBA: « EN 6ᵉ, J’AI PRIS GOÛT À LA PEINTURE, J’AI DÉCIDÉ DE L’EXERCER PLUS TARD ».

Murielle Maboumba figure parmi les femmes congolaises qui s’intéressent de plus en plus aux métiers traditionnels exercés par les hommes comme la peinture, la soudure, l’électricité.

 Seize ans après avoir pris goût à la peinture, Murielle, la vingtaine révolue, mère de 3 enfants s’applique à chaque jour du quotidien dans son métier de peintre et carreleuse. Casque sur la tête, bavette sous le menton, vêtue d’une chemise de couleur bleue, truelle langue de chat à la main, pince perroquet à quelques mètres, niveau et coupe carreaux à ses côtés, nous l’avons rencontrée dans un chantier du Ministère de l’Enseignement Technique et Professionnel non loin du Centre d’Éducation, de Formation et d’Apprentissage, CEFA où elle a obtenu son Certificat d’Aptitude Professionnel, CAP en 2022. 

Très créative, c’est avec précision que Murielle posait les carreaux dans une bâche à eau d’environ 2 mètres carrés avec ses collègues, seule dame sur le chantier sous les ordres de Madame Mireille, formatrice au CEFA.

Murielle a choisi ce métier pour réaliser son rêve d’enfance « Quand j’étais au collège, en 6ᵉ je pense, nous avons peint notre salle de classe avec quelques condisciples, cela avait marché. Dès cet instant, j’ai pris goût à cela et j’ai décidé de l’exercer plus tard. En plus, je fréquentais souvent des peintres », a-t-elle expliqué.

Durant ses deux années de formation, Murielle a tenu bon en bravant tous les obstacles. « Ce métier n’est pas facile, mais je tiens et j’ai tenu bon. Je me souviens encore de ma formation, nous avions six jours de cours la semaine de 8h à 16h. Chaque jour, nous avions 80% de pratique et 20% de théorie. C’était pénible, je quittais parfois chez moi à pied jusqu’au centre par manque de déplacement, il arrivait même que je me trempe sous la pluie. J’ai gardé la tête haute et je suis restée concentrée sur mon objectif. Aujourd’hui, ce sont des histoires à relater ».

Cette vingtenaire, déterminée et impliquée dans ce qu’elle fait, ne trouve aucun problème à travailler avec des hommes, c’est plutôt un plaisir. Cela lui permet de se démarquer et de prouver que la femme est aussi capable d’exercer des métiers pratiqués par des hommes.

En dépit de son amour pour ce métier, Murielle rencontre quelques difficultés en portant des sacs de ciment, de sable et des cartons de carreaux. Mais aussi, elle décline parfois certaines offres, « Je refuse parfois certains travaux, car il y a des clients compliqués. J’ai suivi une formation professionnelle et donc j’applique ce que j’ai appris. Par exemple, avant de peindre une maison, il est important de traiter le mur. Mais lorsque j’explique au client, il trouve que cela est exagéré. Comme j’aime bien faire mon travail, je préfère laisser ».

 Cependant, elle continue à offrir ses prestations à d’autres personnes ou organisations qui s’arriment à ses méthodes de travail. Grâce à son dur labeur, Murielle contribue aux besoins financiers de sa famille. 

Murielle fait partie de la 5ᵉ génération de CAP carreleur formée par le CEFA.  Étant parmi les meilleures apprenantes de sa génération, elle travaille souvent avec sa formatrice et son maître de stages dans plusieurs chantiers à Brazzaville ainsi qu’à l’intérieur du pays. 

Ambitieuse, elle envisage de créer un centre de formation pour former les jeunes filles désireuses de faire de la peinture et du carrelage.

Au Congo, la gente féminine pratique de plus en plus la peinture et le carrelage. En effet, au CEFA, depuis 2016, des femmes sont reçues dans cette filière. A cet effet, le nombre varie généralement entre 3 et 10 chaque année. Cette année, trois jeunes femmes se sont pré-inscrites pour l’année académique 2023-2024. 

Madame Mireille Bitsangou, première formatrice en finition et bâtiment au sein du CEFA, nous a fait part de l’engagement des jeunes filles de cette filière, « En tant que formatrice, je ne rencontre que peu de difficultés. Toutes les filles que j’ai reçues jusqu’ici travaillent au même rythme que les hommes, certaines sont plus performantes et travaillent mieux que les hommes et sont dans des entreprises de la place ».

 Les jeunes femmes devraient ôter des barrières, oser et se lancer dans des métiers ” réservés aux hommes”. Le rapport de la banque mondiale publié le 17 mars 2022 a montré qu’il était important d’encourager les jeunes filles à pratiquer les métiers dits “hommes”. D’ailleurs, la féminisation des métiers serait  un signe d’émancipation de la femme congolaise.

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VITIA KOUTIA